A son retour de la cinquième croisade, Egelolphe II de Ribeaupierre fait don d’une icône de la Vierge Marie à l’ermite installé dans le vallon du Dusenbach.
Pour remercier Dieu de sa protection pendant le siège de Mansourah, il fait ériger une première chapelle à proximité de l’ermitage pour y héberger la précieuse relique et y être inhumé. Très éprouvé par sa campagne, il décède vers 1222, à 45 ans, sans voir la fin des travaux.
Devenue l’âme de ce lieu retiré, la Vierge du Dusenbach attire de nombreux pèlerins « qui venaient en masse de 40 lieues à la ronde », comme l’évoquent des textes anciens. Cette affluence incite Ulrich II et Henri Ier, neveux d’Egelolphe, à construire une seconde chapelle en 1260.
La troisième chapelle est édifiée par Anselme II le Téméraire, miraculeusement rescapé d’une chute qui aurait dû être mortelle. La tradition raconte qu’il aurait fait une chute de plus de 12 mètres de hauteur depuis le rocher dit « Hirtzensprung » en poursuivant un cerf à cheval lors d’une chasse.
Le sanctuaire, pillié et détruit au cours du 14ème siècle par les Armagnacs, a été reconstruit par les frères Brunon Ier et Ulric VII de Ribeaupierre en 1370.
Maximin II, de retour d’un pèlerinage en Terre sainte, décide d’agrandir le Dusenbach en 1484 pour en faire une petite Jérusalem. Il fait rénover les chapelles, et y ajoute un Jardin des Oliviers, taillé dans la pierre. Les statues de Jésus et des trois apôtres endormis sont aujourd’hui à l’abri dans l’église Saint Grégoire de Ribeauvillé. Il commande en 1494 une nouvelle pietà attribuée au scupteur sur bois Lorentz de Ribeauvillé.
D’après ses nouveaux statuts, datés du 16 mars 1606, la confrérie des ménétriers est placée sous le patronage de Notre Dame de Dusenbach ; la vierge Marie est au Moyen Âge la patronne des jongleurs et des musiciens. Lors de leur assemblée annuelle, le Pfeiffertag, qui se tient chaque année le 8 septembre, jour de la nativité de la Vierge, obligation leur est faite entre autres de se confesser, d’assister à la masse et de communier. Quelque 700 ménétriers venus de toute l’Alsace étaient alors autorisés à exercer leur art dans la région, une médaille de Notre-Dame appendue à leur boutonnière en signe de profession de foi.
Le renom du pèlerinage ne cesse de grandir jusqu’au début du 17e siècle. Lors de la Guerre de Trente ans (1618-1648), le sanctuaire est pillé et détruit par les troupes suédoises en 1632. Les frères Augustins qui desservent le pèlerinage depuis le 15e siècle ont toutefois réussi à cacher la pietà.
Le site est abandonné pendant un quart de siècle par les seigneurs de Ribeaupierre devenus protestants. La paix revenue, le sanctuaire renaît de ses cendres grâce à la générosité d’une dame pieuse de la ville qui a fait don de ses biens en faveur de sa reconstruction. Les Augustins assurent à nouveau une présence liturgique dans ce lieu dédié au culte marial.
Devant l’affluence des pèlerins, le prince Max offre une importante somme d’argent consacrée à l’embellissement et l’agrandissement du monastère : une sacristie sera créée, les frères profiteront d’un nouveau logement et l’église sera restructurée.
Le Dusenbach, connu à cette époque pour être le pèlerinage le plus renommé d’Alsace, subit les affres de la période révolutionnaire. En 1791, les chapelles sont fermées sous prétexte que les habitants de Ribeauvillé s’y rendent en grand nombre. En 1792, le Directoire vend le sanctuaire comme Bien National avec ordre de fermer les chapelles au culte. La tolérance des nouveaux propriétaires, deux bourgeois de la ville, font du Dusenbach un lieu de regroupement des catholiques de la région, les églises étant transformées en Temple de Raison.
En 1793, les rassemblements de prière sont interdits et punis par la loi. En mars 1794, ordre est donné de démolir les chapelles qui sont réduites en cendres pour la troisième fois. Les objets liturgiques et la pièta sont fort heureusement sauvés et cachés par des âmes charitables.
Après être resté un siècle en ruines et être passé entre les mains de plusieurs propriétaires, le sanctuaire devient propriété de l’évêché de Strasbourg en avril 1893 en vue de sa reconstruction. La restauration du site commence la même année et le pèlerinage est inauguré en juin 1894 en présence de 30 000 pèlerins selon la chronique de l’époque.
Face à la recrudescence des fidèles, les autorités religieuses décident de construire une nouvelle église de style néo-gothique à la place de l’ancienne dont seule subsiste la porte d’entrée. Les stations du Chemin de Croix qui mènent au Dusenbach sont érigées à la même époque.
Les frères Capucins assurent le ministère et l’administration de Notre Dame de Dusenbach depuis 1904 (avec une interruption entre 2009 et 2016). Depuis 1913, une » Maison des Pèlerins » accueille les promeneurs en quête de calme et de spiritualité. Le Sanctuaire Notre Dame de Dusenbach en totalité, à l’exception de la Maison des Pèlerins et de son extension, est inscrit à l’inventaire des Monuments Historiques (Arrêté du 22 juin 2007).
Ribeauvillé est connu pour sa célèbre Fête des Ménétriers (Pfifferdaj), la plus ancienne fête d’Alsace, qui se déroule tous les ans au mois de septembre.
Au Moyen Âge, les ménétriers formèrent une association respectée appelée les musiciens d’Alsace et placèrent leur corporation sous le haut patronage des Sires de Ribeaupierre. Ceux-ci choisissèrent Notre Dame de Dusenbach comme patronne. Dans les statuts de la corporation, déposés le 16 mars 1606 à la confrérie des musiciens par Eberhard de Ribeaupierre, il est indiqué que chacun de ces derniers devait porter une médaille en argent à l’effigie de Notre-Dame de Dusenbach dans l’exercice public de son art.
En outre, les musiciens devaient se rendre, le jour de la fête de leur confrérie le 8 septembre, à Ribeauvillé et assister à une messe à Notre Dame de Dusenbach. Le chef de l’association, le Roi des Ménétriers, offrait alors un cierge d’un poids considérable aux chapelles de Dusenbach.
Ces règles contribuèrent beaucoup à populariser, le culte de Notre Dame de Dusenbach. Les ménétriers racontaient dans tout le pays les grâces obtenues grâce à la Vierge contribuant à la renommée du pèlerinage dans toute l’Alsace et au-delà.
Tous les ans, à Ribeauvillé, les élus, associations du Pfifferdaj et habitants se rendent au Dusenbach le 2e dimanche de septembre pour perpétuer cette tradition ancestrale.
